Immatriculations militaires antérieures à 1960            

   
Source de la plupart des informations :
François Vauvillier, revues Automobilia et GBM

Les archives relatives aux deux dernières guerres mondiales apportent de des éléments intéressants sur l'immatriculation des véhicules militaires. Au déclenchement de chaque guerre, la réquisition de nombreux véhicules civils a permis de faire face aux premiers besoins, avant que l'industrie automobile ne réoriente complètement sa production.

1914-1918 : Entre août et décembre 1914, environ 15 000 véhicules civils ont été réquisitionnés et ré-immatriculés, pendant que les commandes directes aux USA et à la Grande Bretagne concernaient environ 1000 unités. A l'époque, les immatriculations militaires comportaient jusqu'à 6 caractères et Thierry Baudin a rédigé cet article sur la période 1914-1918,   (english version) à l'issue d'un important travail de recherche dans les archives et registres. 
En Octobre 2011, un article très complet de Thierry Baudin, dans la revue GBM (N°98)  traite précisement du contexte de ces immatriculations militaires de la période 1914-18, grâce à l'iconographie très complète de François Vauvillier. Nous vous recommandions d'acheter ce magazine GBM, s'il n'est pas épuisé..

 

Voici par ailleurs la photo d'une Ford Torpedo prise près de la Cantine du Vieil Armand, fin 1914. Elle semble indiquer que ce véhicule militaire est affecté à la Croix Rouge (CR-4707)

1922-1938 : Le décret du 31/12/1922 redéfini les règles d'immatriculation des véhicules militaires. Un drapeau précède 1 à 5 chiffres en blanc sur un fond noir, attribués par tranches aux différents constructeurs selon les marchés. Un premier ouvrage de Jacques Borgé et Nicolas Viasnoff édité chez Balland montre des photos de véhicules en 1931. Par la suite le numéro hors série N° 3 de GBM  (que vous pouvez acquérir en ligne) présente un dossier exceptionnel de François Vauvillier d'une centaine de pages très bien illustré. Nous y apprenons en détail l'affectation des tranches de 1000 en 1000 des véhicules pour toute la période 1923 à 1938.

Des différences intéressent les immatriculations militaires dans les colonies et mandats français : La tranche de 1 à 2000 a été surtout affectée au Levant (Syrie et Liban), celle de 4001 à 5000 à l'Algérie et la Tunisie et celle de 6001 à 8000 au Maroc.
Des photos inédites présentent des véhicules militaires spécifiques à la Cocinchine, avec un préfixe CSM, ou COC pour le Corps d'Occupation de Chine (lettres superposées au drapeau). Sont également mentionnés des séries spécifiques à l'AOF et l'AEF, avec des immatriculations sur 3 caractères suivis d'un suffixe -1 ou -2.
 

1938-1945 : Ce système étant épuisé 15 ans plus tard, l'arrêté du 16 avril 1938 prévoit qu'un M précède le même ensemble. Pendant la guerre de 39/45, il en sera de même avec les lettres P puis K (voir tableau bleu). Exemple : P 26857. Les remorques portaient 2 plaques à l'arrière, une rappellant le numéro du véhicule tracteur, l'autre dans la série des 100000.

De septembre à décembre 1939, environ 290000 véhicules civils, principalement dit "d'usage général" sont réquisitionnés. Ceci ne pose pas de problème particulier puisque ce nombre correspond à un peu plus d'une production annuelle, ou à un sixième du parc français. Les véhicules sont repeints et réimmatriculés dans des séries ou une lettre et une tranche de chiffres caractérisent la Région Militaire (voir tableau rose). Souvent un drapeau précède l'ensemble, mais il y a de nombreuses variantes : lettre manquante ou décalée, groupe de 6 chiffres coupé en deux par un tiret, voire inversion de couleur... Exemples L 392-801, F265210, 424074N, ou 253753.

Type / Région Militaire / Date Lettre Chiffres  
Commandes militaires du 1/1/23 au 16/4/1938   1 à 99999  
Commandes militaires du 16/4/1938 à fin 1939 M 1 à 99999  
Commandes milit.de fin 1939 au printemps 1940 P 1 à 99999  
Commandes milit.du printemps 1940 au 8/05/1945 K 1 à 25000  
Défense Passive à Paris en 1939 et 1940 DP 1 à 1000 ?  
Fourniture véhicules neufs par les USA en 1942   > 400000  
      Re-immat. par Camouflage Du Matériel
Requisitions 1ère RM = Lille (à partir de 09/39) A 10001 à 50000 (env)  
Requisitions 2ème RM = Amiens B 50001 à 100000 (env)  
Requisitions 3ème RM = Rouen C 100001 à 145000 (env)  
Requisitions 4ème RM = Le Mans D 146001 à 204000 (env)  
Requisitions 5ème RM = Orléans E 201001 à 240000 (env)  
Requisitions 6ème RM = Metz F 240001 à 285000 (env)  
Requisitions 7ème RM = Besançon G 285001 à 319000 (env) 1 à 9999 VG 1 à 15
Requisitions 8ème RM = Dijon H 313001 à 370000 (env)  
Requisitions 9ème RM = Tours L 370001 à 407000 (env) 1 à 9999 VJ 1 à 15
10ème RM : dissoute en 1934      
Requisitions 11ème RM = Nantes N 407001 à 440000 (env)  
12ème RM = Limoges : dissoute en 1934     1 à 9999 VM 1 à 15
Requisitions 13ème RM = Clermont-Ferrand R 440001 à 475000 (env) 1 à 9999 VN 1 à 15
Requisitions 14ème RM = Lyon S 475001 à 520000 (env) 1 à 9999 VO 1 à 15
Requisitions 15ème RM = Marseille T 520001 à 570000 (env) 1 à 9999 VP 1 à 15
Requisitions 16ème RM = Montpellier U 571001 à 600000 (env) 1 à 9999 VR 1 à 15
Requisitions 17ème RM = Toulouse V 600001 à 620000 (env) 1 à 9999 VS 1 à 15
Requisitions 18ème RM = Bordeaux X 620001 à 680000 (env) 1 à 9999 VT 1 à 15
Requisitions 19ème RM = Alger Y 680001 à 710000 (env) 1 à 9999 VU 1 à 15
Requisitions 19ème RM = Alger : après 11/42 Y > 900000  
Requisitions 20ème RM = Nancy W 710001 à 745000 (env)  
Requisitions RMP = Paris Z 745001 à 845000 (env)  
Requisitions Tunisie J 845001 à 860000 (env) 1 à 9999 VY 1 à 15
Requisitions Maroc K 860001 à 870000 (env) 1 à 9999 VU 1 à 15
Requisitions individuelles après 8/10/39 P 901001 à 912000  
Requisitions Levant (Syrie et Liban) TL 1 à 99999 1 à 9999 VZ 1 à 15
Requisitions Indochine (T puis TSM CSM ) T 1 à 10000  

L'avenir de ces véhicules réquisitionnés devient très intéressant quand le régime de Vichy signe une armistice avec l'occupant nazi le 22/06/1940 . Pour affaiblir l'occupant, le lieutenant-colonel Mollard, chef du CDM « Camouflage Du Matériel » va redonner une immatriculation civile à des milliers de véhicules. La note du 4/07/1940 instaure un système d'immatriculation inédit d'apparence civile (voir tableau vert). Le dernier chiffre indique le constructeur du véhicule : 1=Renault, 2=Citroën, 3=Peugeot, 4=Berliet, 5=Panhard, 6=Latil, 7=Saurer, 8=Unic, 9=Rochet-Schneider, 10=Matford, 15=autres marques.

L'arrivée en 11/1942 en Zone libre provoquera de nouvelles réquisitions, mais de nombreux véhicules auront été soustraits à l'occupant.

L'apport de véhicules fournis par les Américains et la libération amènera une refonte du système d'immatriculation en 1945.

 

 

1945-1947 : 
À la fin de la Seconde Guerre Mondiale, les véhicules qui sont immatriculés correspondent à ceux reçus des États-Unis ou bien provenant des Alliés. Ces véhicules sont immatriculés selon la numérotation utilisée pendant le conflit.

Entre 1946 et 1954, les véhicules militaires en Indochine étaient du type : IC - 12345 (IC signifiant Infanterie Coloniale). 

    

1947-1959 : 
Sur le territoire métropolitain, le système préfigure celui adopté en 1960 (voir
Immatriculations militaires depuis 1960) mais sans référence à l'année, ainsi que le montre cette photo d'un véhicule de la gendarmerie de 1954 extrait d'un ouvrage de Jacques Borgé et Nicolas Viasnoff édité chez Balland :

Dès 1947, un nouveau système est mis en place. Il est basé sur une répartition des véhicules par type, ceux-ci étant au nombre de 10 :
- véhicules de liaison tout terrain, jeep et command-cars,
- voitures de liaison type routières,
- motos,
- ambulances,
- camionnettes (tous modèles d'une charge utile inférieure à 2 tonnes),
- camions (tous modèles d'une charge utile inférieure à 6 tonnes),
- camions lourds,
- tracteurs routiers, d'artillerie et agricoles,
- engins de combat (chars, semi-chenillés et auto-mitrailleuses),
- remorques et semi-remorques.

Le tableau ci-dessous récapitule les codes utilisés.

 

Terre

Air

Marine

Véhicules de liaison tout terrain, jeep et command-cars

0xxxxx

03xxxx

04xxxx

Véhicules de liaison type routières

1xxxxx

13xxxx

14xxxx

Motos

2xxxxx

23xxxx

24xxxx

Ambulances

300xxx à 307xxx

33xxxx

34xxxx

Camions lourds -

310xxx à 350xxx

-
Camionnettes (tous types < 2 t) 4xxxxx

43xxxx

44xxxx
Camions (tous types < 6 t) 5xxxxx

53xxxx

54xxxx
Cars 601xxx et 620xxx

-

-
Camions lourds 611xxx à 616xxx

631xxx à 636xxx

64xxxx
Tracteurs routiers, d'artillerie et agricoles 700xxx à 710xxx

73xxxx

74xxxx
Véhicules de combat 8xxxxx

83xxxx

84xxxx
Véhicules chenillés (prototypes) 900xxx

-

-
Remorques et semi-remorques 10xxxxx

133xxxx

144xxxx

 

Quelques exemples de plaques dont certaines ont des codes inconnus (36x xxx et 77x xxx).

 

Cet article a été rédigé par Jean-Emmanuel Chevry et Jean-François Zuraw à partir des articles de François Vauvillier dans la revue Automobilia, des informations de Jean Schuliar et de Hervé Boulc'h.